“Sang” d’ Umar Timol
Après sa Parole Testament suivi de chimie, le poète Umar Timol revient avec Sang, un nouveau recueil de poèmes publié dans la collection “Poètes des Cinq continents”, chez l’Harmattan.
Sang est un petit ouvrage d’une cinquantaine de pages qui réunit prose et vers libres. Composé de deux parties, Sang et Toi, ce recueil se veut un chant d’amour dédié à une certaine Shaheen, la muse qui fait perdre la tête à notre poète.
Lorsque l’on connaît le style de Timol, face à cette poésie qui accorde au thème de l’amour une dimension incommensurable, on ne peut que s’attendre à l’expression violente d’une poussée d’émotions. De l’abîme où se tortillent les sentiments auréolés d’un parfum mystique, jaillit tout un tourbillon de mots et d’expressions. En exploitant l’immensité et la profondeur de leurs sens, le poète parvient à jeter la base d’un édifice érigé pour symboliser un parfait hymne à la beauté.
Folie poétique
Tel “un ver de terre amoureux de la lune” (hugolien), le poète enchanteur se fait esclave et s’abreuve aux pieds de sa maîtresse, sa “lunaire tyrannique”. Perdant la raison, renonçant au devoir, le poète qui mendie, qui “rampe comme un animal”, qui “lave et baise les pieds”, devient en fin de compte un “poète fou”. S’arrachant à lui-même, se confinant à son monde de rêveries, entrelacé dans les yeux de l’alter ego, le poète rêveur passe ses jours et nuits à chanter : “tu es belle. Et je suis fou”.
Elle, c’est l’autre, “l’astre noir”, le “festin qui corrompt”, la “gazelle opaline”. Elle, c’est le référent poétique qui est à l’origine de l’écoulement verbal, du flux de la poéticité. Elle, c’est la “nébuleuse bleue” autour de laquelle s’organise tout le voyage poétique d’ Umar Timol – le voyage initiatique pendant lequel ce dernier “déracine (son) moi afin d’être toi”. Car la muse est aussi le miroir dans lequel le poète se cherche.
“Tu es miroir. Et tu décolores les incarnats vénéreux du mal... Tu es miroir. Et je te fracase... Et je suis poussière qui cerne niche incandescente.”
Au-delà de cette poésie frénétique, on reconnaît Umar Timol, le poète qui excelle dans l’art du néologisme. En composant des mots à partir de leurs formes existantes (en inventant, par exemple, des verbes à partir des noms), il rompt avec les règles du langage.
Avec Timol, il ne faut pas prendre les mots selon leurs valeurs sémantiques. C’est dans leurs effets poétiques qu’ils trouvent la justification de leur droit d’incursion au sein du langage. La poésie chez notre poète sert la création verbale autant que cette dernière sait prétexter la versification.
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